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Pourquoi un “dictionnaire” des violences psychologiques ?

Auteur : Dr Emmanuel Escard

L’UIMPV souhaite établir un lexique alphabétique à visée pédagogique et didactique pour les professionnel-le-s concerné-e-s par le sujet spécifique des violences psychologiques conjugales. Il s’agirait d’une première dans le monde francophone, alors qu’il existe des ouvrages recensant les termes clés utilisés dans des sujets proches (la violence, la non-violence, le crime, le suicide, la psychotraumatologie…).

Ce travail s’inscrit dans les besoins constatés suite à notre recherche débutée aux HUG en 2016 sur cette thématique en collaboration avec l’Université de Neuchâtel et soutenue financièrement par la fondation Oak (Jaquier Erard V, Schindler M, Escard E). En effet, les violences psychologiques conjugales sont fréquentes, multiples, invisibles et peu détectées, et leurs conséquences sont importantes sur la santé globale. Il est souvent difficile de préciser leur début et leur gradation. De nouvelles violences psychologiques se sont développées avec les nouveaux médias, moyens de communication, de rencontre, de surveillance et de manipulation, et avec l’évolution des couples et familles séparées et recomposées.

Les professionnel-le-s interrogée-e-s reconnaissent que les définitions sont floues, en avoir une connaissance très partielle et fragmentée et avoir besoin de formations dans ce domaine. Les personnes victimes ont besoin de pouvoir être reconnues et soutenues, avec des constats et des thérapies adaptés. Les témoins, proches, et les auteurs de ces violences ont besoin aussi d’être informés sur ces mécanismes relationnels délétères.

Alors que dans notre Unité, nous recensons actuellement 16 types de violences psychologiques, ce qui est beaucoup plus que la plupart des structures accueillant des situations de violence, notre travail préliminaire a fait le recueil de plus de 300 termes utilisés pour décrire les violences psychologiques et leurs mécanismes.

Un lexique permettra de se libérer des confusions, malentendus et équivoques et de formuler une pensée plus claire et cohérente aux confins de ce qui est violence ou pas, tolérable ou pas, condamnable ou pas. Il s’agit de mettre des mots en action et interaction. En effet, spontanément, les mots nous manquent pour penser et dire la violence psychologique. Ce travail de dénomination permet d’ouvrir l’accès à une meilleure compréhension de ces violences, et familiariser les lectrices/lecteurs et les professionnel-le-s à cet univers conceptuel fruit du terrain.

Les mots sélectionnés sont loin d’épuiser le champ du possible et ne prétendent pas à l’exhaustivité, cette liste étant d’ailleurs dynamique et à étayer régulièrement. D’autre part, cet inventaire pour le couple peut aussi éclairer des violences psychologiques dans d’autres contextes (violences éducatives, travail, école, rue, groupes religieux, sportifs, politiques, militaires etc).

Dans une société que l’on dit parfois, non sans raison, à pensée unique à force de vouloir être politiquement correcte, ce travail essaye de mettre en exergue une pensée dans la nuance et la distinction, dans l’acte conscient et libre de signaler et signifier les différences (selon Eric Volant). Nous espérons qu’elle puisse enrichir une clinique fine d’aide au dévoilement du sens, qui ne laisse pas de côté l’individu en tant qu’individu, et s’intéresse aux différentes facettes, à ses mobiles et idées ancrés dans des unités de temps et de lieux.

 

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Publié par Sandrine Tinland

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