Les violences sexistes à l’école
Auteur : Dr. E. Escard
Les résultats d’une étude récente sur les violences scolaires en France portant sur 47 604 élèves de 8 à 19 ans, mise en perspective avec des découvertes faites lors de 30 ans de recherche, sont alarmants.
Ils confirment que les violences sont fréquentes à l’école, le plus haut taux de violences physiques étant à l’école primaire (jusqu’à 52% des élèves) et de violences symboliques au collège et lycée (jusqu’à 35% de rejet, chiffres plus élevés en filière professionnelle). On peut parler de véritables violences ordinaires, continues d’une oppression de groupe, avec refus du féminin, y compris pour les garçons. Les violences psychologiques peuvent avoir des conséquences lourdes, en terme d’échec scolaire et professionnel, mais aussi de comportements violents auto-agressifs ou hétéro-agressifs futurs.
Un certain nombre de stéréotypes à ce sujet sont à combattre :
- La violence à l’école est en effet rarement une violence d’intrusion venant de l’extérieur des établissements (2% des cas seulement)
- Les microviolences, répétées et souvent sournoises, sont de loin les plus fréquentes
- Ces violences sont un piège autant pour les filles que pour les garçons, ceux-ci sont aussi souvent victimes, notamment d’insultes sexistes, de rabaissements, d’humiliations
- La qualité des savoirs ne suffit pas pour faire une bonne école, le bien-être des élèves est primordial
- La violence à l’école n’est pas due au laxisme pédagogique. Elle s’observe dans des familles ayant différents styles d’éducation. Les punitions peuvent d’ailleurs aggraver le problème comme « médailles de virilité », à l’origine d’une escalade. La stabilité du personnel d’encadrement et des enseignants est par contre l’élément majeur de cohésion et prévention (problème d’un turn-over trop élevé).
En France il est estimé que 600 000 à 700 000 élèves sont harcelés à l’école. 20 à 25% d’entre eux n’en ont parlé à personne, 50% des problèmes seraient résolus s’ils en parlent.
Les violences sexuelles entre élèves s‘observeraient aussi en primaire (baisers forcés, déshabillages forcés, voyeurisme…). Des lieux importants concernant les violences sont les toilettes et les terrains de foot.
Il est retrouvé une exclusion des personnes différentes des normes du groupe (trop bonne élève, étrangère, croyante, LGBTI, pas assez riche…).
Une corrélation positive a été notée entre harcèlement classique et cyberviolence, et entre harcèlement et insultes sexistes.
L’école n’a pas pour rôle d’être complice de la construction d’une discrimination et inégalité sociale.
Il est conseillé de développer des stratégies nationales/cantonales de lutte contre les violences sexistes, dès l’école primaire. Les études montrent que ces programmes sont très « coût-efficaces ». L’important est que les élèves et les enseignants jouent un rôle actif dans ces démonstrations (jeu de rôle, théatre, forum, coopération…). Il faut associer aussi les familles et communautés, afin de promouvoir l’égalité, la non-discrimination, la rencontre avec l’Autre, la mixité, le consentement éclairé…
La qualité des directions, la formation des enseignants sur cette thématique (15% d’entre eux se sentiraient harcelés…) comptent également beaucoup, pour montrer l’exemple d’une bonne coopération, discussion démocratique et finalement d’un humanisme fondamental…
Références : Debardieux E., Alessandrin A., Dagorn J., Gaillard O. Les violences sexistes à l'école : une oppression viriliste. Rapport de l'Observatoire européen de la violence à l'école. 30/05/2018.